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Alchimie émotionnelle - tristesse

Récit

La sorcière était à genoux. Des larmes coulaient le long de ses joues. Elle venait de laisser libre court à la rage et la colère. Devant elle, derrière elle, à sa gauche, à sa droite, tout autour d’elle, les débris voletaient en poussières fines. Seule une tour du château demeurait. Sa magie avait rasé la campagne. Elle s’était arrêté à la forêt qui ceinturait le domaine. Ses larmes ne suffiraient pas à soigner la culpabilité qui la rongerait dans le futur. Elle devrait répondre de ses actes. Pas devant les humains mais devant la déesse. Elle n’attendait qu’une chose que la déesse lui retire ces pouvoirs qu’elle ne contrôlait pas. Plus les pouvoirs étaient grands, plus les responsabilités qui en découlaient l’étaient aussi. 

La colère et la rage cachaient une tristesse immense, celle du désespoir, de se retrouver là seule et impuissante. Il y avait eu les trahisons, les regards, les murmures accusateurs. L’injustice avait eu un goût métallique dans sa bouche. Comment en était-elle arrivée là ? Comment n’avait-elle pas vu le ras de marée qui montait peu à peu en elle et qui menaçait de la terrasser. Elle avait essayé de le contrôler mais en vain.

Le pire avait été de constater que sa famille l’évitait et la rejetait. Rejetée et abandonnée par tous ceux à qui elle avait donné son coeur. Une cinquantaine de chevaliers étaient arrivés par la route Nord. Leurs chevaux fringants renâclaient et piaffaient de peur sur place. La tension avait été tout bonnement trop forte. Elle s’était fait bousculer par l’un d’eux tandis qu’il descendait de son cheval et cherchait un endroit où passer la nuit. Un autre l’avait accostée. Elle l’avait observé de son air fier et hautain. L’homme gras et petit l’avait mal pris et avait rapidement commencé à faire des ennuis. Rien de bien méchant et qui n’aurait pu présager la perte dramatique de contrôle dont elle avait fait preuve. Sa main grasse et collante avait accroché son bras pour la retourner et la plaquer contre un des piquets où les chevaux attachés attendaient patiemment qu’on leur trouve un boxe. 

Sa main poisseuse enserrait sa gorge. 

La gorge était le seul endroit où elle refusait que quiconque la touche. Seul, celui à qui elle s’était donnée jadis avait le droit de s’attarder à cet endroit et d’y exercer quelque violence. Elle était à bout. Elle était fatiguée, las de cette vie. Ainsi, elle n’avait pas entendu le supérieur de cet homme le rappeler à l’ordre. Elle ne l’avait pas senti relâcher sa prise et reculer. 

Ses yeux ne voyaient plus rien, aveuglée par ce trop plein. Des éclairs claquaient à tout va. La magie en elle était sortie petit à petit. Elle s’était mis à briller de mille feux. L’idiot avait sorti un couteau et menacé de la conduire au bucher. Cela avait été suffisant pour qu’elle relâche le monstre en elle et lui autorise à déployer sa force la plus terrifiante.

Aucune âme n’avait survécu à cette folie. Les chevaux et les animaux avaient eu le temps de fuir. Les humains et autres créatures, pas. 

Ainsi, elle se trouvait là au milieu de cette terre noire, carbonisée face à ce calme horrifiant. 

Les décombres bougèrent sur sa droite. Elle dirigea son attention à cet endroit. Le chef de la bande qui avait empêché son soldat de la toucher se releva péniblement. Il se tenait désormais si près d’elle qu’elle pouvait sentir son odeur de menthe citronnée. Etrange pour un humain, se dit-elle. Son odeur était fraiche alors qu’il venait de parcourir des lieues à dos de cheval. Comment était-ce possible pour un humain. A moins que ce n’en soit pas un… Elle réfléchissait trop. Elle ferma ses yeux. Il était envoyé par la déesse. Ce ne pouvait être que la seule explication plausible. Forte de cette certitude, elle sourit et étendit les bras, s’attendant à sentir la morsure froide de l’acier percer ses entrailles et remonter jusqu’à son coeur. Elle inspira et se détendit. Les crispations et les tenions accentuaient la torture. Les nombreuses cicatrices qu’elle arborait prouvait les méfaits qu’elle avait subis. Elle fut soulagée. Il la tuerait pour ce qu’elle venait de faire et enfin, la souffrance s’en irait. Elle ne serait plus esclave de sa tristesse, du poids qu’elle portait chaque heure et chaque jour qui passait. L’homme s’avança mais dans son regard, elle ne perçut pas de dégout, pas de haine ni de désir de vengeance. Elle ne bougea pas d’un cheveu. Ses pieds étaient plantés dans le sol.

Des doigts glacés se posèrent sur sa gorge. Surprise, elle sursauta et rouvrit les yeux instinctivement. Son visage s’approcha du sien et il murmura suavement à son oreille : 

Penses-tu que je laisserai jamais quelqu’un poser les mains comme il l’a fait sur toi ? 

Cette voix. Jamais elle n’aurait cru l'entendre à nouveau un jour. Elle ferma les yeux et ouvrit son troisième oeil. Il fallait qu’elle s’assure que ses sens ne la trompaient pas. C’était bien lui. Après toutes ces années, il se tenait debout face à elle. La tension dans son corps se relâcha. La décompression fut trop vive, trop importante. Le pouvoir demandait son dû et elle s’écroula avant de sombrer dans l’inconscience. Il la rattrapa et la souleva comme si elle ne pesait que le poids d’une plume. Il ne restait plus rien ici. Il la ramena à la maison, au coeur des bois et l’étendit sur un lit de mousse au centre d’un cercle de sorcière. L’heure était enfin venue. La joie se substitua à la tristesse. Ils s’en iraient ensemble comme ils étaient venus rejoindre une terre et un univers connus d’eux seuls. Ils retournaient à la source, à cet oeuf cosmique qui les avait expulsés dans ce monde froid, atroce et remplis de dualités. Leurs corps perdirent de leur substance et ils retournèrent à l’état de vide. Avant de se dissoudre totalement, une dernière étreinte… 

Charnelle 

Puissante 

Multidimensionelle 

Intemporelle 

Reliés depuis la nuit des temps de coeur à coeur, d’âme à âme et pendant encore un bref soupir de corps à corps. 

Voyage au coeur des couples divins et sacrés et alchimie émotionnelle - la douleur de séparation. 

Prenez soin de vous, à tout bientôt mes poussières d'étoiles! 

Clara J. 

Ton jardin te parle
Il guérit ton âme et ton corps